L’été dernier on a beaucoup entendu parler d’une importante étude scientifique qui a prouvé que l’hormonothérapie de synthèse, qui combine oestrogène et progestatifs, peut causer une augmentation inacceptable des risques de coagulation anormale du sang, de maladies cardiaques et de cancer du sein (voir ma chronique de septembre-octobre 2002 à ce sujet). Puis, à la fin de septembre, la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) publiait un communiqué avisant les médecins qu’il n’était plus recommandé de prescrire l’hormonothérapie «combinée et continue» pour prévenir les maladies du coeur ou même comme traitement principal contre l’ostéoporose, le cancer colorectal ou la maladie d’Alzheimer. C’est pourquoi bien des médecins conseillent maintenant à leurs patientes de cesser cette thérapie, ce qui laisse un grand nombre de femmes confuses et exposées à des effets de sevrage qui peuvent être fort désagréables.
J’aimerais d’abord préciser ce qu’est l’hormonothérapie «combinée et continue». L’hormonothérapie est dite «combinée»lorsque l’on ajoute un progestatif à la prescription d’oestrogène. Les médecins prescrivent cette combinaison d’hormones aux femmes qui ont leur utérus pour éviter que l’oestrogène ne provoque un cancer de l’endomètre car cette muqueuse, qui tapisse l’intérieur de l’utérus, est très sensible à la stimulation oestrogénique. La combinaison d’hormones la plus prescrite est Premarin et Provera. L’hormonothérapie est considérée comme «continue» si elle se prolonge pendant plus de cinq ans.
Le problème mis en évidence par l’étude du Women’s Health Initiative dont on a tant parlé est que les progestatifs, qui ne sont pas de la «vraie» progestérone et donc n’en possèdent pas les mêmes propriétés, augmentent plusieurs des effets secondaires de l’oestrogène plutôt que de contribuer à les diminuer ou à les éviter comme le ferait la progestérone bio-identique.
Un arrêt soudain de l’hormonothérapie conventionnelle, surtout chez les femmes qui prennent des hormones depuis des années, provoquera inévitablement une chute rapide des niveaux d’hormones – pouvant entraîner des problèmes tels que la dépression, les chaleurs et la perte accélérée de masse osseuse. Bon nombre de femmes se retrouveront donc avec des prescriptions pour des antidépresseurs, des somnifères, des biphosphonates comme le Fosamax, etc.
Que faire? Est-on condamnées à prendre des médicaments toute notre vie? Bien sûr, il sera sage d’aller au magasin d’aliments naturels où l’on trouvera plein de produits pour la ménopause. Mais n’oubliez pas que l’équilibre hormonal n’est pas seulement une question de prendre des suppléments pour combler un déficit en hormones. Il faudra avant tout adopter une approche globale à la santé hormonale grâce à une alimentation plus appropriée à ce temps de la vie, la désintoxication régulière du foie et des intestins, l’exercice et le contrôle du stress. Certaines femmes auront toutefois besoin de prendre des suppléments qui peuvent aider leur corps à se rééquilibrer en ce temps de transition hormonale. La phytothérapie et l’homéopathie peuvent être de puissantes alliées dans ce processus. D’autres devront peut-être utiliser un support hormonal sous forme d’hormones bio-identiques qui constitueront une hormonothérapie «douce» et respectueuse du nouvel équilibre hormonal qui s’installe normalement à la ménopause.
Le protocole de sevrage de l’hormonothérapie combinée que suggère le Dr John Lee consiste à remplacer le Provera par la progestérone bio-identique sous forme de crème transdermique. La crème à la progestérone vous protègera contre les effets stimulants du Premarin (ou tout autre oestrogène d’ordonnance) pendant que vous le diminuez graduellement. Ce processus peut facilement durer jusqu’à trois mois. Une fois votre sevrage de l’oestrogène terminé, vous pourrez le remplacer par des phytoestrogènes ou une crème magistrale à l’oestriol (voir références ci-dessous). Quant à la crème à la progestérone, il se pourrait que vous en ayez besoin à plus long terme, surtout si vous êtes à risque d’ostéoporose.
Parmi les plantes à effets oestrogéniques (phytoestrogènes), qui ont fait leurs preuves pour aider les femmes qui ont des chaleurs ou qui souffrent de sécheresse vaginale, je conseille particulièrement le trèfle rouge, l’actée à grappe noire, (appelée également cimicaire à grappe), et la baie de gattilier (Vitex agnus castus). Le trèfle rouge devient très populaire comme supplément oestrogénique car il contient une gamme complète d’isoflavones et ne pose pas les mêmes risques de surcharger le foie que le soja. Quant à l’actée à grappes noires, recherchez les produits (comme Nu-Fem par Enzymatic Therapy) où l’ingrédient actif est standardisé, c’est-à-dire qui contiennent 2,5% de glycosides triterpéniques évalués en 27-déoxyactéine. Personnellement, je préfère les produits «simples» plutôt que ceux qui regroupent de grandes quantités d’ingrédients.
Si vous prenez des suppléments de phytoestrogènes contenant des isoflavones et consommez de plus des aliments à base de soja, le Dr Robert Arnot (voir références) conseille de ne pas dépasser environ 60 mg de génistéine. Une trop grande quantité de cette substance pourrait augmenter la stimulation oestrogénique et devenir dangereuse surtout pour les tissus mammaires. De plus, vous risquez de surcharger votre foie qui joue un rôle primordial dans le métabolisme hormonal.
Pour ce qui est de l’ajout de soja dans l’alimentation, il faut noter qu’une consommation excessive de produits de soja non fermenté, tels que le lait de soja et le tofu, n’est pas recommandée. Le Dr David Zava, un biochimiste bien connu qui a étudié cette question, nous prévient que les phytates et d’autres «anti-nutriments » que contiennent le soja peuvent être nuisibles en grande quantité. Comme le fait remarquer le Dr Zava, les femmes asiatiques consomment le soja davantage sous des formes fermentées (telles que le tempeh et le miso) et leur alimentation comporte plus d’algues marines qui compensent pour les carences en minéraux que pourrait provoquer le soja. Évitez le soja non fermenté en particulier si vous avez des problèmes de pancréas ou de thyroïde.
Même lorsque vous aurez terminé votre sevrage des hormones d’ordonnance, vous pourriez avoir besoin d’un apport en progestérone à plus long terme. La crème à la progestérone bio-identique s’est avérée très utile pour bien des femmes car les symptômes de la ménopause sont souvent dus à un manque de cette hormone. Pour les femmes qui ont également besoin d’oestrogène, si la phytothérapie ne suffit pas, il est possible d’ajouter des oestrogènes bio-identiques (oestradiol, oestrone et oestriol) à la crème à la progestérone. Quelles que soient les hormones que vous utilisiez, il est important qu’elles soient sous forme transdermique pour épargner le foie.
Notez que la crème à la progestérone bio-identique ne se vend pas dans les magasins d’aliments naturels au Canada. On ne peut l’obtenir que sur ordonnance. (Aux États-Unis, elle est en vente libre.) Les crèmes à l’igname sauvage que l’on trouve dans les magasins par ici n’ont pas les propriétés de la progestérone bio-identique. (Voir références ci-dessous).Lorsque votre sevrage sera terminé, une bonne façon de savoir où vous en êtes sur le plan hormonal est de faire le Test d’équilibre hormonal du Dr John Lee. Vos symptômes sont des indicateurs très clairs de vos besoins en hormones. Pour un diagnostic plus précis, il faut faire une analyse salivaire, qui est maintenant disponible au Canada.
Références et lectures recommandées:
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Communiqué de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada
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«Don’t go overboard with the soy foods», article par David Zava, Ph.D., publié dans le Bulletin médical du Dr John R Lee, mai 1998
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Dr Robert Arnot, M.D., «Comment réduire les risques de cancer du sein par l’alimentation», First Editions
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Dr John R. Lee, M.D., «Tout savoir sur la préménopause», Éditions Sully
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Voir ma chronique intitulée «L’oestriol pourrait-il être l’élixir des femmes ménopausées?»
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Voir ma chronique intitulée «Ce qu’il faut savoir sur les hormones naturelles pour bien gérer sa ménopause»