Si vous voulez tester les connaissances de votre médecin en ce qui a trait aux hormones, demandez-lui cette simple question: «Docteur, quand vous prescrivez des oestrogènes à une femme qui n’a plus d’utérus, lui donnez-vous également de la progestérone?» Il est à peu près certain qu’il ou elle répondra «non».
En effet, bien des médecins ne semblent pas être au courant des rôles multiples que joue la progestérone dans le corps humain. D’emblée, ils proposent aux femmes de prendre de l’œstrogène car on attribue à cette hormone toutes sortes d’effets thérapeutiques et bienfaisants, pour ne pas dire rajeunissants. Pour ce qui est de la progestérone, que l’on confond avec les progestines (la progestérone synthétique), on vous dira qu’elle ne sert qu’à contrer l’effet cancérigène de l’œstrogène sur l’utérus.
Donc, une femme qui n’a pas d’utérus n’aurait aucune raison de prendre de la progestérone. Comme l’explique le Dr. John R. Lee, M.D. dans son livre «What Your Doctor May Not Tell You About Menopause» (Ce que votre médecin ne vous dit peut-être pas sur la ménopause), «très tôt dans l’évolution de l’industrie des thérapies de remplacement hormonal, la progestérone a non seulement été oubliée, mais on l’a délibérément confondue avec les progestines synthétiques.
Les compagnies pharmaceutiques qui vendent ces produits brevetés d’ordonnance ont eu un succès remarquable à créer la confusion parmi les médecins en ce qui a trait à la nature même de la progestérone. Le médecin typique croit que les produits synthétiques qu’on appelle «progestines» sont en fait de la progestérone!» (p. 80)
Santé Canada n’en sait pas plus
Toutefois, il semblerait que la confusion règne également à Santé Canada! En effet, le 1er mai 1997 le Ministère publiait un communiqué de presse faisant une mise en garde contre l’utilisation de la crème à la progestérone naturelle, spécifiquement la crème Renewed Balance mise en marché par la compagnie AIM International des É.-U.* Dans ce communiqué, la progestérone est décrite comme un «médicament d’ordonnance dont l’utilisation par des femmes enceintes pourrait entraîner un risque pour le foetus».
Pas rassurant
Je ne trouve pas ça très rassurant de la part de notre organisme national de protection de la santé! Dans une réponse à ce communiqué que j’ai faite au ministre de la Santé (publiée dans la revue santé Alive en juillet 1997), j’invitais le ministre à vérifier la définition de «progestérone» dans un dictionnaire. La progestérone y est définie non pas comme un médicament mais comme une hormone sécrétée par l’ovaire ainsi que par le placenta. On lit dans le Petit Robert: «La progestérone prépare la muqueuse utérine à l’implantation de l’oeuf et assure le maintien de la grossesse». Pour les deux sexes, les glandes surrénales sécrètent de la progestérone toute la vie durant, et les testicules en produisent chez les hommes.
J’ai suggéré au ministre qu’il pourrait remédier à la confusion de ses fonctionnaires en leur faisant lire les ouvrages du Dr Lee, et d’éminents auteurs canadiens, p. ex. la Dre Carolyn DeMarco, M.D. qui se spécialise dans la santé des femmes et la Professeure Jerilyn Prior, M.D., de l’Université de Colombie-Britannique, une recherchiste de réputation internationale. Il y aurait aussi les ouvrages de la Dre Katharina Dalton, de Grande-Bretagne, qui mène des recherches dans ce domaine depuis plus de 40 ans.
Ces praticiens et chercheurs établissent clairement la différence entre la progestérone et les progestines et affirment que les femmes qui utilisent les thérapies de remplacement hormonal traditionnelles basées sur l’œstrogène risquent de souffrir de déséquilibre hormonal à cause d’une carence en progestérone et d’un excès d’œstrogène. De plus, le syndrome prémenstruel (SPM) serait également dû à un tel déséquilibre.
Une pionnière de la recherche sur le SPM
C’est à la Dre Dalton qu’on doit la prise au sérieux, par la profession médicale, du SPM. Dans un ouvrage intitulé «PMS:The Essential Guide to Treatment Options» elle parle de l’utilisation de la progestérone naturelle bio-identique pour rétablir l’équilibre hormonal chez les femmes souffrant du SPM. Elle affirme que «Bien que les progestatifs [un autre terme pour désigner les progestines] aient la capacité de produire des saignements de retrait, à d’autres égards ils n’ont pas exactement les mêmes propriétés que la progestérone bio-identique. Entre autres, les niveaux sanguins de progestérone augmentent lorsqu’on administre de la progestérone bio-identique, alors qu’ils diminuent lorsqu’on administre des progestatifs (non bio-identiques) –ce qui est à l’opposé de ce que les femmes ont besoin dans le traitement du SPM.»
Dans sa pratique médicale, la Dre Dalton a utilisé pendant plus de 40 ans la progestérone naturelle bio-identique sous des formes qui ne passent pas par le foie (non orales) pour traiter non seulement le SPM, mais aussi l’infertilité, les problèmes de fausses-couches, la nausée du début de grossesse, la pré-éclampsie, la dépression post-partum et les symptômes de la ménopause. Son succès remarquable est bien documenté. Elle précise que de tels résultats sont obtenus avec la progestérone naturelle bio-identique et non les progestines, qui ont plutôt pour effet d’empirer le SPM, et peuvent causer des fausses-couches. Les progestines sont en fait des «imposteurs hormonaux» qui occupent nos récepteurs cellulaires de progestérone et empêchent notre propre progestérone de jouer le rôle prévu par la nature.
Des cas vécus
Dans son livre « Équilibre hormonal et progestérone naturelle, le Dr Lee parle du cas d’une Canadienne qui lui avait envoyé son dossier médical. Son médecin avait diagnostiqué une carence en progestérone et prescrit de la progestérone synthétique (Provera). Le médecin avait beau augmenter la dose de Provera, les niveaux sériques de sa patiente demeuraient à zéro. C’est le technicien de laboratoire qui a finalement renseigné le médecin en écrivant sur son rapport d’analyse «Docteur, vous donnez à cette femme du Provera, puis vous demandez que des tests soient faits pour la progestérone sérique. Le Provera n’est pas de la progestérone!» (p. 65). Et, comme le note le Dr Lee, la pauvre femme éprouvait entre temps toutes sortes de problèmes causés par les effets secondaires du médicament, tels que: perte d’appétit, nausées, indigestion, fatigue, dépression, etc.
Un autre cas est celui d’une femme de Montréal qui m’a appelée récemment. Elle avait fait plusieurs fausses-couches dans les trois premiers mois de grossesse, et son médecin a diagnostiqué (correctement) un manque de progestérone. Cependant, il lui a prescrit du PROVERA, malgré le fait qu’un des effets secondaires de ce médicament est de causer des fausses couches. De toute évidence le médecin de cette dame ne connaît pas la différence entre les progestines et la progestérone lui non plus. (Pourtant, la progestérone bio-identique existe non seulement sous forme de crème, mais aussi sous forme de comprimés qui peuvent être prescrits.)
Les risques associés aux progestines
Ces deux femmes auraient pu éprouver toutes sortes d’autres effets nocifs. Bien des femmes qui me relatent leur expérience avec les progestines me racontent des histoires d’horreur: par exemple, perte de vision, violentes migraines qui peuvent durer jusqu’à dix jours de suite, arythmies cardiaques, phlébites, thromboses, accidents cérébrovasculaires, etc. La liste est fort longue, et je suggère à toute femme qui prend ce type de médicament (dont le nom générique est acétate de médroxyprogestérone ou MPA) de bien lire la liste des effets secondaires (demandez-la à votre pharmacien).
Alors pourquoi les médecins ne prescrivent-ils pas la progestérone bio-identique? Le dilemme est qu’au Canada la majorité des médecins ne connaissent pas ce produit ou le confondent avec les progestines. Cette confusion a donc pour résultat de pratiquement nier aux femmes l’accès à un produit qui peut dramatiquement améliorer leur qualité de vie. Dans ses livres et dans ses conférences, le Dr Lee disait toujours qu’il incombait aux femmes de se renseigner pour pouvoir éduquer leurs médecins. En dernière analyse, c’est la demande des consommateurs qui est la plus puissante et même le monde médical finira par en tenir compte.
*La Renewed Balance est loin d’être la seule crème à la progestérone qui est mise en marché aux É.-U. et que les Canadiennes peuvent faire venir pour usage personnel. Il existe présentement au moins une trentaine de marques de crème à la progestérone qui sont disponibles sur le marché. Toutes n’ont pas le même contenu en progestérone et toutes n’ont pas les mêmes ingrédients support.
Le site web du Dr John Lee contient une liste des crèmes qui répondent à ses critères pour la pureté et le contenu en progestérone. Toutefois, il est plus sage d’être guidée par un professionnel de la santé ou une personne-ressource ayant de l’expérience avec ce genre de produit, même si vous le trouvez sur le marché . Ces crèmes sont en vente libre aux É.-U. mais pas au Canada. Aucun magasin d’aliments naturels au Canada ne vend ce genre de produit, et méfiez-vous de tout produit qu’on vous présenterait comme «précurseur de progestérone» dans le corps. Il s’agit de fausse réclame. Voir à ce propos ma chronique: «Ce qu’il faut savoir sur les hormones naturelles pour bien gérer sa ménopause».